La VW Schwimmwagen n’est sans doute pas la plus belle voiture de tous les temps, mais garée dans la rue, elle attire sans doute autant de curieux qu’une sportive ou un cabriolet des années 50. Et il se trouve que c’est la voiture amphibie la plus produite de tous les temps …
La frange « militaria » du monde la collection est souvent méconnue du grand public, à tort ou à raison. Il n’empêche que les développements militaires ont permis l’émergence de nombreux modèles intéressants. Sur terre, cette Schwimmwagen, la « voiture qui nage », a l’air un peu étrange, mais sur son terrain (la terre et les cours d’eau) elle se révèle un redoutable engin de franchissement et l’une des voitures les plus intéressantes de l’histoire de l’industrie automobile. Et ce n’est sans doute pas un hasard quand on observe que son concepteur est Ferdinand Porsche, alors coordinateur de l’effort de guerre industriel du Troisième Reich.
Le châssis poutre de la Coccinelle (alors KdF), conçue en 1938 par Porsche, était inadapté à l’utilisation amphibie et Erwin Kommenda, le designer du bureau d’étude Porsche, réalisa une coque sans la moindre ouverture, en forme de coquille de noix. Ce projet baptisé type 128 était basé sur les mêmes proportions que la KdF ou la « KubelWagen » type 82, déclinaison militaire de la KdF. Cette coque se révéla finalement fragile en usage tout terrain intensif, résistant mal aux efforts en torsion, avec de fréquentes ruptures du métal. Seule une trentaine de protypes typ 128 furent fabriqués.
Porsche révisa donc le projet, en réduisant l’empattement de 240 à 200 cm, pour donner naissance au typ 166 qui fut produit à 15.584 exemplaires de 1941 à 1944. 14.276 d’entre-eux furent fabriqués à l’usine KdF de Wolfsburg (l’actuelle usine VW) et 1.308 chez Porsche. Au regard de ces chiffres, la VW 166 est la voiture amphibie la plus produite en masse dans l’histoire !
Sa conception générale était très similaire au Typ 128 originel, mais en plus compact et plus léger : 3,8 m de longueur et 900 kg. Cette petite voiture accueillait quatre soldats avec un armement complet et pouvait les transporter partout où les véhicules à chenilles pouvaient passer. Le tout était motorisé par le petit 4 cylindres à plat de la KdF refroidi par air de 1100 cm3 et 25 cv ! Par comparaison, la célèbre Jeep Willys MB développait 60 CV.
La puissance est envoyée à l’arrière ou aux quatre roues via une transmission manuelle à quatre vitesses et une boîte de transfert à deux démultiplications. La vitesse maximale sur route en 4e vitesse est de 90 km/h.
Des différentiels autobloquants ZF ont été installés pour augmenter la capacité de franchissement, et des réducteurs ont été ajoutés aux moyeux de roue pour en accroitre la garde au sol. La « Schwimmwagen » était une propulsion arrière avec une option pour activer l’essieu pour renforcer la motricité en conditions difficiles.
Sur la terre ferme, la voiture a un look distinctif avec une roue de secours sur le capot avant, une main courante sur les côtés, et son hélice de propulsion aquatique rabattue sur le capot AR.
Dans l’eau, la SchwimmWagen se déplace à l’aide d’une hélice articulée qui vient s’engrener sur l’extrémité du vilebrequin via une transmission par chaine. Deux rames permettaient d’atteindre le rivage en cas de panne moteur, tandis que l’orientation des roues avant fait office de gouvernail.
La vitesse dans l’eau atteint 12 km / h, en consommant 10 litres d’essence par heure. La capacité du réservoir est de 50 litres, permettant de parcourir 520 km à terre. L’engin fait preuve d’une efficacité incroyable en tout terrain et sa capacité à entrer ou sortir de l’eau avec facilité via des rampes particulièrement raides est hallucinante.
A la mi-1944 la production a dû être interrompue en raison des bombardements alliés qui ont endommagé l’usine de Wolfsburg.
On estime qu’environ 200 VW Type 166 survivent encore dans le monde d’aujourd’hui et font la joie des collectionneurs lors de démonstrations toujours spectaculaires.
La plupart sont des véhicules qui ont été abandonnés par les troupes allemandes lors de la débâcle, sur les différentes lignes de front. Beaucoup d’entre-elles sont aujourd’hui dans des musées, les autres aux mains d’amateurs passionnés. Parfois, rarement, certaines se retrouvent sur le marché, comme l’exemplaire beige (en état moyen) qui illustre ce dossier et qui a été vendu en 2020 pour 155.000 Euros. Les exemplaires parfaitement restaurés dépassent aisément le 1/4 de million d’euros …
Quant à la typ 128, une seule des 30 fabriquées aurait survécu (numéro de châssis #19) et a été scrupuleusement restaurée. Elle fait aujourd’hui partie de la collection privée Grundmann, en Allemagne. Sur la photo ci-dessus, on voit parfaitement la différence de gabarit entre les modèles 128 et 166.
A noter aussi la présence sur le marché de reproductions, souvent construites pour les besoins de l’industrie cinématographique, et qui ne sont que de modestes copies destinées à être vues de loin dans un contexte d’action.
Mais, au regard du prix atteint par les typ 166, d’autres repliques, plus fidèles et plus difficilement identifiables, font parfois surface dans les pays de l’est. Il faut donc être particulièrement vigilant si vous vous mettez en quête d’une de ces originales voitures amphibies…